Déclarations de Magali Guillemot
Pour accéder directement aux rubriques : du lundi 12 novembre : sur son Curriculum Vitae du mercredi 14 novembre : sur les détails médicaux et l'emploi du temps avec Lubin |
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Lundi 12 novembre - Après 17H00 [heure
excate non notée] : TEMOIGNAGE DE MAGALI GUILLEMOT SUR
SON CURRICULUM VITAE :
Le Président reprend les différents interrogatoires de Magali Guillemot de l’instruction des 19 janvier, 24 mai et 19 juin 1995. Il interroge Magali Guillemot sur : * Son enfance Magali GUILLEMOT : - J’étais heureuse ; j’avais un lien très fort avec ma soeur, mais peu de relations avec mes parents. En classe j’aimais être la première, cela m’était facile et j’étais contente de rendre ainsi mes parents fiers de moi, je n’en tirais vraiment aucune vanité .. * La vie professionnelle de ses parents Magali GUILLEMOT : - Mes parents étaient trésoriers à l’administration fiscale, détachés à plusieurs reprises pour l’Education Nationale à des postes comme celui de l’Ecole Centrale, où mon père et ma mère se sont succédés, puis à Dauphine pour ma mère et à Mantes pour mon père comme trésorier à la perception générale. Aujourd’hui, ils sont à la retraite, et ce depuis 1993. * La vie en famille : Magali GUILLEMOT : - Ma vision du couple de mes parents a évolué avec l’âge. J’avais l’impression, étant petite, que mon père commandait parce qu’il avait une grosse voix et qu’il criait. Mais je me suis aperçue qu’en fait c’était ma mère qui détenait l’autorité parentale. Elle a écarté mon père de notre éducation. Et je dois dire que j’ai souffert de son absence, mais cette absence est plutôt à mettre sur le compte du caractère maternel. Encore aujourd’hui cela se manifeste par des petits détails de la vie de tous les jours : c’est toujours elle qui répond au téléphone. J’ai peu de souvenirs de ma mère. Elle était toujours là quand on avait besoin d’elle, mais elle n’extériorisait pas de tendresse. * L’adolescence : Magali GUILLEMOT : - J’avais un grand besoin de plaire pour être aimée. D’ailleurs je pratiquais le sport en équipe pour les amitiés que cela créait et pour le sentiment de vivre comme dans une grande famille. Je voulais être aimée, je suis timide, pas autoritaire et c’est pour cela que les autres m’aiment et même qu’ils se confient à moi … A l’adolescence, je n’aimais pas l’image que j’avais de moi, j’étais encombrée par mon corps et je me trouvais trop grosse. Le Président fait remarquer que Magali se dit extravertie étant petite, alors qu’elle ne l’est plus depuis longtemps. * Les Relations avec sa soeur Clélia : Magali GUILLEMOT : - J’avais une grande admiration pour Clélia. Peu à peu, à l’âge adulte, nous nous sommes éloignées, mais sur les choses importantes, nous nous retrouvons. Je reste sa confidente. Par exemple, elle m’a présenté son fiancé avant nos parents. Elle est la première de la famille à qui j’ai fait connaître Jérôme. A la naissance de ma nièce Cécile, j’ai eu la révélation de ma féminité et de ce que pouvait être le bonheur de la maternité. * L’école Centrale : Magali GUILLEMOT : - J’ai choisi Centrale pour plusieurs raisons. La première, c’est que j’étais persuadée que j’allais retrouver sur ce campus, une ambiance de collège. La seconde raison, c’est que mes parents, en partie du fait de leur vie professionnelle connaissaient Centrale, et m’encourageaient à faire une grande école. Je n’ai pas vraiment choisi à priori telle ou telle grande école. J’étais, en fait, plus attirée par la médecine, la biologie ou les sciences de l’environnement. D’ailleurs, à Centrale, j’avais pris l’option Océan, jusqu’au moment où j’ai compris qu’en fait d’environnement, il s’agissait surtout de former des ingénieurs à la recherche de champs pétrolifères en milieu maritime ! J’étais vraiment immature et je suivais le mouvement. Je ne me suis pas sentie dans mon élément à Centrale, c’était une époque où je me cherchais : Je me suis beaucoup remise en question ; j’étais quelqu’un sans ambition dans un milieu d’ambitieux. Je ne voyais pas mon avenir, alors que pour la plus part de mes camarades, il était là, tout tracé. * La vie professionnelle : Magali GUILLEMOT : - J’ai débuté à 24 ans, chez THOMSON où je ne me suis pas du tout sentie à l’aise, mon supérieur semblant avoir du mal à accepter une centralienne dans son équipe ; Je ne me suis pas plu du tout dans ce premier job. Je devais conseiller des gens de dix ans de plus que moi, je ne me sentais pas crédible. Je suis arrivée au CEA en janvier 93. J’ai tout de suite aimé l’ambiance du travail en équipe, familiale et chaleureuse. Je me suis sentie plus à l’aise là. A la question sur son salaire : Magali GUILLEMOT : - Je gagnais 14 000 F net par mois . * Le Président l’interroge ensuite sur ses relations amoureuses avant Jérôme : Magali GUILLEMOT : - J’ai eu peu d'expériences, trois-quatre. Mais je cherchais un prince charmant. A propos d’Alain Joyeux, je le trouvais gentil, charmant, mais trop mondain et aussi ambitieux à l’époque. Je ne voulais pas m’engager avec lui et puis j’avais trop de travail. A Centrale, j’ai eu deux relations avec des élèves, mais sans importance. En fait, je cherchais vraiment le Prince charmant. Je voulais rencontrer un homme avec lequel je pourrais m’engager pour la vie. Oui j’étais courtisée, mais je ne trouvais pas ce que je cherchais, c’est-à-dire une relation authentique, vraie avec le prince charmant. * L’agence matrimoniale : Le PRESIDENT : - Comment vous est venue l’idée d’une agence matrimoniale ? Magali GUILLEMOT : - Une amie avait été tentée par ce moyen. Cela m’en a donné l’idée. Un jour j’ai trouvé une publicité dans ma boîte à lettres et je me suis dis, pourquoi pas ? C’était le moyen de rencontrer des gens déterminés pour une relation longue et solide, comme moi. Autour de moi, tous mes collègues étaient mariés, j’avais peu de chance de rencontrer quelqu’un pour faire ma vie. Je sortais de mes études et ne connaissais rien. Je voulais éviter les cadres dynamiques et ambitieux comme à Centrale. Et puis j’avais de moi une image très négative. Je me sentais seule. Le PRESIDENT : - Et par votre soeur ? Magali GUILLEMOT : - Elle connaissait principalement des femmes. Le PRESIDENT : - Avez-vous parlé de votre projet autour de vous ? Magali GUILLEMOT : - Je n’en ai parlé à personne. Au cour d’un repas en famille, j’ai essayé, j’ai lancé l’idée, mais je n’ai senti aucune écoute. On ne m’a pas comprise. Je n’ai pas insisté. Le PRESIDENT : - En Août 1993, vous rencontrez Jérôme Duchemin. Il vous a plu tout de suite ? Magali GUILLEMOT : - Oui, il était différent des autres hommes que je connaissais. Et puis il était charmant, c’était mon complément, c’était l’homme de ma vie. Il était romantique, m’a offert un bijou, des fleurs, des roses. Il était authentique, vivant pour la musique. C’était un autre milieu. Je ne voulais pas refaire ce que j’avais connu avec mes parents, c’est-à-dire ne jamais cesser de parler de travailler ou d’entendre parler de travail, dès le retour le soir. Pour mon futur enfant, je ne voulais pas de cela. Le PRESIDENT : - Avez-vous parlé tout de suite à Clélia de Jérôme ? Magali GUILLEMOT : - Oui, à Clélia et à mes amis. Le Président rappelle que Magali et Jérôme Duchemin se sont rencontrés fin août 93 et dès janvier 94, ils s’installent dans un appartement à Montrouge. Le PRESIDENT : - Avez-vous eu des relations sexuelles immédiatement ? Magali GUILLEMOT : - Assez rapidement Les parents de Jérôme ont été au courant de notre relation avant mes parents, ils ont voulu me connaître tout de suite. Mes parents ont eu un a priori négatif à cause de la situation professionnelle de Jérôme Duchemin et de nos différences de milieu, mais ils ont accepté mon choix et ils ont bien accueilli Jérôme Duchemin, comme leur fils. Je crois qu’ils ont été surpris par la rapidité de notre décision, et puis maman trouvait qu’il n’était pas assez attentionné . Le PRESIDENT : - Comment étaient vos relations avec Jérôme à partir de votre grossesse ? Magali GUILLEMOT : - Au début ça se passait bien. C’est vrai que Jérôme était stressé au moment des concerts. Et puis quand j’ai été enceinte, il a changé. A l’annonce de ma grossesse, il n’a manifesté aucun enthousiasme, ce n’était pas une surprise pour lui puisque l’absence de contraception avait été une sorte d’accord tacite entre nous. Plus je grossissais, moins il supportait. Il avait envie d’un enfant, mais il me rejetait alors que j’étais enceinte. Il y avait de réelles tensions entre nous. Par exemple il ne supportait pas de toucher mon ventre ; je lui proposais de mettre la main sur mon ventre pour sentir le bébé, ça l’agaçait. C’était une pile électrique, il n’était pas attentionné. Le PRESIDENT : - De quelles tensions parlez-vous ? Magali GUILLEMOT : - Il était très autoritaire, et je n’acceptais pas toujours ses ordres. Mais j’étais amoureuse de lui et pensais que Lubin allait nous rapprocher. Et puis, au moins au début, quand nous avions des conflits, il faisait amende honorable. Jérôme n’était pas toujours très facile à vivre, mais c’était un peu comme mon père. Et puis, il était artiste, un artiste ça n’est pas toujours facile. Le PRESIDENT : - Vous avez dit que Jérôme avait « les poches percées ». Magali GUILLEMOT : - Il n’avait plus de carte bleue, il était constamment dans le rouge. Au début, il payait la moitié du loyer, puis il a eu des difficultés à régler un retard d’impôts. Sinon, il ne faisait pas de dépenses extravagantes. Il s’est juste acheté une voiture, avec toutes les options. Mais il avait besoin d’une voiture. Puis il a cessé de participer aux dépenses du foyer, j’assurais toutes les courses. Intervention de l’Avocat Général : L’AVOCAT GENERAL : - Je m’excuse par avance si certaines de mes questions paraissent brutales, mais il s’agit de connaître la vraie nature de Magali Guillemot. Vous faites des critiques assez vives concernant votre mère, vous aviez de bons rapports ? Magali GUILLEMOT : - Ma Mère était très présente quand j’étais petites, pendant mes études. Du coup ça a écarté mon père de l’éducation. Ma soeur Clélia s’est aussi beaucoup occupée de moi, petite. L’AVOCAT GENERAL : - L’image de votre mère n’est pas gratifiante ? Magali GUILLEMOT : - Si au contraire, car elle était toujours très présente, à l’écoute ; mais peut-être a-t-elle manqué d’extérioriser la tendresse. L’AVOCAT GENERAL : - Clélia était plus séduisante que vous? Magali GUILLEMOT : - Oui, mais elle ne cherchait pas à plaire ; elle était le plus souvent en jeans, et gros pull. Je l'admirais, elle était un peu artiste. L’AVOCAT GENERAL : - Diriez-vous que vous avez de la personnalité ? Magali GUILLEMOT : - Qu’est ce que vous entendez pas avoir de la personnalité ? L’AVOCAT GENERAL : - Que vous êtes adepte de l’affirmation de soi ? Magali GUILLEMOT : - Non pas du tout. Petite j'étais très entourée, j'écoutais les autres. Je ne m’affirme pas, je suis plutôt en retrait. L’AVOCAT GENERAL : - Votre relation avec votre ami Alain Joyeux et votre rapport à la sexualité sont étranges. A aucun moment vous ne vous offrez ? Magali GUILLEMOT : - A l’époque, je me sentais coincée, lui avait un engagement fort par rapport à moi. J’avais peur, c’était un pas à franchir que je ne pouvais accomplir en pleine prépa de Centrale. L’AVOCAT GENERAL : - Le recours à une agence matrimoniale à 24 ans : c’est une peur de la vie ou un besoin de tout organiser. Est-ce que je me trompe ? Magali GUILLEMOT : - Oui. (silence) … Je recherchais l'affection mais je voulais faire l'économie de l'imprévu, j’ai besoin de garanties. J’avais été déçue par mes autres expériences, et à l’époque, j’avais l’impression que je ne trouverais plus l’occasion de rencontrer personne d’intéressant. L’AVOCAT GENERAL : - Vous dites que vous n'êtes pas ambitieuse alors que parfois vous êtes obsédée par le travail ? Magali GUILLEMOT : - J'aime m'investir. Je suis consciencieuse et ça n’a rien à voir avec l’ambition. J’étais passionnée par ce que je faisais, je découvrais, j’apprenais. L’AVOCAT GENERAL : - L’univers professionnel était important pour vous ? Magali GUILLEMOT : - Oui, 8 à 10 heures par jour L’AVOCAT GENERAL : - Quelle représentation aviez-vous de Jérôme Duchemin ? Magali GUILLEMOT : - Jérôme avait un côté viril, masculin L’AVOCAT GENERAL : - Etait-ce une mésalliance ? Magali GUILLEMOT : - Pas du tout, on m’a cataloguée comme une intellectuelle, en fait je suis quelqu’un de très simple. L’AVOCAT GENERAL : - Froide et sèche ? Magali GUILLEMOT : - Quand j’étais petite, je pleurais beaucoup, j’étais émotive. Puis je me suis fabriquée une carapace contre les émotions quand elles sont trop fortes. L’AVOCAT GENERAL : - Alors vous ne pleurez jamais ? Magali GUILLEMOT : - Devant les autres, … je manque d’habitude. L’AVOCAT GENERAL : - Vous avez une vie secrète, invisible aux autres ? Magali GUILLEMOT : - Non je suis complètement compréhensible et ouverte. L’AVOCAT GENERAL : - Et qu’est-ce que ça vous fait d’être ici, entourée de vos avocats, avec personne en face ? Magali Guillemot fond en larmes. Magali GUILLEMOT : - Il m’est insupportable d’être en face de l’assassin de mon fils. Je suis à sa place, c’est lui l’assassin de mon bébé, je n’ai jamais fait de mal à Lubin ! L’AVOCAT GENERAL : - Mais je vous ferai remarquer qu’il dit même chose de vous. Magali GUILLEMOT : - Jérôme Duchemin sait très bien que c’est lui ! Il a avoué au début .. ! L’AVOCAT GENERAL : - Non ! Maître SENYK intervient . MAITRE SENYK : - Magali, vous vous souvenez ce que vous a dit Clélia lorsque vous êtes sortie de prison ? Magali Guillemot continue de pleurer et ne peut pas parler. MAITRE SENYK : - Elle est venue vous voir avec les jumeaux et vous a dit : “ Je te donne les jumeaux et tu vas t’en occuper ”. Et Magali a passé deux mois à s’occuper de ces bébés. L’AVOCAT GENERAL : - Devant les problèmes, comment réagissez-vous ? Magali GUILLEMOT : - Je réfléchis, mais quand je suis paniquée, je me tétanise et ne bouge plus. L’AVOCAT GENERAL : - Donc, vous sortez de prison en 1996 et vous êtes réintégrée au CEA ? Magali GUILLEMOT : - Oui, mais dans un autre service car le mien avait déménagé à Marcoule. L’AVOCAT GENERAL : - Vous rencontrez Pierre Maynadier en 1998, qui est-il ? Magali GUILLEMOT : - Mon chef de service au CEA L’AVOCAT GENERAL : - Quel âge a-t-il ? et vivez-vous ensemble ? Magali GUILLEMOT : - 49 ans. Nous vivons ensemble depuis 1999 L’AVOCAT GENERAL : - Envisagez-vous d’avoir un enfant ? Magali GUILLEMOT : - Pas avant d’avoir fait le deuil de Lubin. Retour de Me Bensoussan [avocat de J. Duchemin] dans l’assistance. MAÎTRE LOMBARD : -Madame Guillemot pouvez-vous nous expliquer en quoi consiste votre travail au CEA ? Magali GUILLEMOT : - Il s’agit de trouver des méthodes de décontamination de zones qui ont abrité des matières nucléaires. Actuellement c’est la zone de Fontenay-aux-Roses, mais ensuite cette méthode pourra s’appliquer à tous les endroits de ce type. MAÎTRE LOMBARD : - Vous avez été reprise par le CEA en 96 puis en décembre 2000 à votre poste ? Magali GUILLEMOT : - Oui MAÎTRE LOMBARD : - Votre vocation pour un travail à caractère social trouve un écho dans votre travail ? Magali GUILLEMOT : - Non, mais je fais de la gestion de projet, donc un travail en équipe. MAÎTRE LOMBARD : - Vous serez reprise par le CEA si vous êtes acquittée ? Magali GUILLEMOT : - Oui. Le PRESIDENT lit une déposition de Madame Roussillon, Secrétaire générale de Centrale, qui dit avoir connu les parents de Magali, les tient en grande estime et juge que la conduite de Magali à Centrale ne reflétait pas l’éducation qu’elle avait reçue. En d’autres termes, elle était dissipée et très volage. Magali GUILLEMOT : - Je ne connais pas cette dame. Je ne l’ai jamais vue. Il y a plus de trois cent élèves à Centrale et je pense que, même si elle connaît mes parents, elle ne m’a jamais rencontré personnellement. Elle me confond probablement avec une autre élève. Il y avait des jeunes filles qui couchaient à droite et à gauche et ce n’était pas du tout mon genre. Le PRESIDENT lit le témoignage du frère du père de Magali Guillemot. Pour lui les parents de Magali se partageaient les tâches, ils étaient nerveux mais les enfants ne devaient pas en souffrir. Le PRESIDENT lit ensuite le témoignage d’une famille amie des parents, puis, le témoignage de Bernard BOULLIS (ancien chef de service de Magali) qui la décrit comme ayant un bon bagage, un bon relationnel et pas de problème, et enfin le témoignage de la directrice d’Union Conseil (l’agence matrimoniale) qui décrit Magali comme « une jeune femme dynamique, sympathique et avec un but sérieux ». “ Je ne pense pas qu’elle était capable de violence “ . Fin de la déposition. Mercredi 14 novembre : ouverture d'audience 9h50 - QUESTIONS A MAGALI GUILLEMOT (ET A J. DUCHEMIN) SUR LES DETAILS MEDICAUX ET L'EMPLOI DU TEMPS AVEC LUBIN Magali Guillemot est à la barre, interrogée par le Président sur les visites aux médecins. Le PRESIDENT : - Les visites de Lubin Duchemin aux médecins sont les suivantes : * le 24 octobre 94 : visite chez le pédiatre le Docteur Breton * le 26 octobre : visite chez le Dr Savel, généraliste * le 10 novembre : visite chez le Dr Savel * le 18 novembre : visite à la PMI * le 24 novembre : visite chez le pédiatre,. * le 29 novembre : visite chez le pédiatre, le Dr Nassif, remplaçant du Dr Breton MAÎTRE LOMBARD - Permettez-moi de vous faire observer que en tout, ce bébé a été vu sept fois en consultation pendant ses deux mois de vie. Le PRESIDENT à l’Huissier : - Pourriez-vous ouvrir le scellé n°1 contenant en particulier le carnet de santé de Lubin. Ce carnet de santé, mis sous scellé en janvier 95 par le juge d’instruction y a été laissé jusqu'à ce jour, sans possibilité de le consulter. Le Président demande que soient faites des photocopies de ce carnet de santé pour la Défense et l’Avocat Général. Le PRESIDENT : - Il est écrit que le 29/11/94 vous avez vu du sang sur le bavoir du biberon de 4/5 heures du matin ? Magali GUILLEMOT : - Effectivement le bavoir était plein de sang. LE PRESIDENT - Dans l’une de vos déclarations, vous parliez de traces de sang et non pas de "plein de sang". Magali GUILLEMOT : - Je me souviens très bien de ce bavoir : c’était un petit bavoir jaune. J’ai dit ça parce que ces traces de sang m’avaient choquée : le bavoir était tout mouillé et les tâches étaient rouge écarlate. Mais le matin, Lubin a pris son biberon normalement. J’ai alors téléphoné à ma mère, à ma belle-mère qui m’a a conseillé de voir un médecin. Je suis donc allée chez mon pédiatre le Dr Breton, où un remplaçant du docteur, le Dr Nassif, a ausculté Lubin, et m’a rassurée en diagnostiquant une oesophagite et en m’expliquant que ce n'est pas grave ; il a donné une ordonnance pour un gel, le Poslysillane, destiné à panser l'oesophage. J’ai donné le biberon en rentrant de chez le médecin, Jérôme est rentré vers 20h et a pris le relais. Je me suis couchée vers 21h. Le Président donne lecture du carnet de santé. Le PRESIDENT : - Le 24 novembre sont prescrits un BCG et un onguent, et le 29 novembre, le gel, un autre médicament, et une injection de BCG. Le PRESIDENT : - Qu’avez-vous fait dans la journée du 30 novembre ? Magali GUILLEMOT : - Jérôme est parti vers 13h30. De 10h00 à 11h00, j’ai eu un long coup de fil d’Anne Mugnier, ma collègue de travail, concernant un dossier qu’elle rédigeait et sur lequel j’avais travaillé avec elle. Je n’ai pas donné de bain à Lubin parce qu’il venait d’avoir le BCG. En portant Lubin de la cuisine au salon, j’ai légèrement heurté la porte avec sa tête. Il n’y a pas eu d’hématome, Lubin n’a pas pleuré. C’était un heurt très léger. Ensuite j’ai téléphoné à ma soeur assez longuement pour avoir de ses nouvelles parce qu’elle avait été malade. Ma voisine Madame Chazottes est venue me voir. Je lui ai parlé des régurgitations de sang qui m'avaient quand même marquée, et de ce qu’avait prescrit le médecin. J’ai été chercher Lubin dans sa chambre - il avait les yeux ouverts - et je l’ai ramené avec nous. Ensuite, tout en parlant avec elle, j’ai préparé le biberon. L'AVOCAT GENERAL : - Pourquoi avez vous donné le biberon du 30 novembre dans la nuit ? Lui aviez-vous déjà donné le biberon de nuit auparavant ? Magali GUILLEMOT : - Peut-être, oui L'AVOCAT GENERAL : - A quelle occasion ? Pouvez-vous me donner une date ? Magali GUILLEMOT : - … Je ne m’en souviens pas. MAÎTRE LOMBARD : - Vous a-t-on jamais posé la question de savoir si vous aviez donné une autre fois le biberon de nuit ? ???? [manque de prise de notes] L'AVOCAT GENERAL : - Vous avez déclaré en mars 1995 qu’effectivement vous donniez le biberon ce soir-là pour la première fois : votre mère souhaitait que Jérôme ne donne plus de biberon. Magali GUILLEMOT : - C’était un désir de ma mère. D’après elle ce n’était pas le rôle de Jérôme de donner le biberon la nuit. Du reste, elle m’expliquait que je devais le faire changer de rythme et espacer les biberons de nuit. Cette nuit là Jérôme est rentré vers minuit et je n’avais pas fini. Je lui ai proposé de finir mais il a refusé. L'AVOCAT GENERAL : - Que s’est-il passé dans la nuit suivante, du 1er décembre ? Magali GUILLEMOT : - Jérôme rentre tard – vers 1heure du matin -, j’étais couchée. Dans la nuit je me réveille. Le baby-call n’est pas allumé et je l'allume. Alors j’ai entendu du bruit : j’entends Lubin geindre. Je vais le voir et le trouve tout mou. Je m'inquiète. Je ramène Lubin dans notre chambre, j'en parle à mon mari qui ausculte le bébé. Lubin geignait très étrangement. Je pense au SAMU. Mais Jérôme me dit que je suis folle. Finalement, j’appelle SOS médecins. Quand la voiture de SOS Médecins arrive, Jérôme se recouche, juste avant l’arrivée du médecin à l'appartement. Le Dr de SOS médecins, le Dr Legrand, ausculte mon bébé, ne voit rien d’anormal et veut me rassurer. Il me conseille d'aller consulter le pédiatre le lendemain. Puis j'ai veillé le bébé. A 6h pour le biberon, ça ne va pas. A 7h, je passe donc un coup de fil chez le pédiatre le Dr Breton, il y a le répondeur, disant d’appeler à partir de 9heures. Je passe de nouveau un coup de fil juste après l'ouverture de 9h ; le pédiatre me propose de venir à 10h, ce que je fais. L'AVOCAT GENERAL : - Etes vous sûre que le choc contre la porte dont vous avez parlé date bien du 30/11 et non du 29/11comme vous l’avez déclaré dans une autre déposition ? Magali GUILLEMOT : - C’était le 30 novembre. Ce heurt était léger, Lubin n'a pas eu d'hématome. Jérôme était dans le canapé. L'AVOCAT GENERAL : - Voila un couple bien maladroit ! Suit alors une discussion sur la façon de porter le bébé par Magali. Magali montre comme elle installe et porte le bébé : contre son torse dans son bras droit, le bras gauche libre. [elle est gauchère] [NdlR : Dans une telle position le bébé présenterait son côté gauche contre le corps de sa mère, son côté droit vers l'extérieur. ] L'AVOCAT GENERAL : - Comment se composaient vos journées ? Magali GUILLEMOT : - Le matin après le biberon je faisais les tâches ménagères. Vers 11h00 je donnais le biberon et le bain, je m’occupais de Lubin. Je ne le recouchais pas tout de suite après le biberon, quelquefois je faisais des photos, et enfin je le recouchais. L’après-midi, je faisais des courses avec lui et souvent je voyais ma voisine Madame Chazottes. Le soir je préparais le dîner mais il arrivait que Jérôme préfère manger du chocolat. Le week-end je profitais de la présence de Jérôme pour aller faire des courses seule. Ou bien nous allions ensemble chez les parents de Jérôme ou les miens. Nous ne restions pas ensemble seuls. Le Président revient sur le carnet de santé et fait lecture de ce qu’y a annoté le Docteur Legrand [( ?)] et aussi lecture de l'ordonnance pour le gel pour l'oesophage qui a été acheté. Le PRESIDENT à Jérôme Duchemin : - Parlez-nous de ces régurgitations et des deux derniers jours. JERÔME DUCHEMIN : - J’étais très pris par la préparation du concours de Grenoble. Je partais très tôt le matin pour aller répéter. Le lundi soir (dans la nuit du 28 au 29 novembre), Lubin régurgite aussitôt après le biberon, je mets le bavoir sur le radiateur. J’allume le moins possible pour ne pas le réveiller. Le mardi 29 au soir quand je rentre, Magali m’a signalé des filets de sang sur le bavoir, me parle de la visite chez le pédiatre et du gel. Je lui ai dit que je n’avais rien vu. Puis elle s'est couchée. J’attend le réveil du bébé, lui donne le gel et le biberon . Le 30 novembre, le mercredi, je me suis réveillé tard. Je corrige des copies dans la matinée. Je n’ai pas été témoin de choc contre la porte. Je pars pour des répétitions et des cours et reviens de Versailles vers minuit trente. Je n’ai pas vu le bébé avant de partir, je l’ai seulement embrassé, car ce n’est pas l’avoir vu que de l’avoir tenu dans ses bras. Le soir, je rentre, j’apprends que Magali lui a donné le biberon. Je vais dans sa chambre sans réveiller le bébé : je ne l’ai pas vu cette nuit là. [NdlR : Dans ses dépositions pendant l'instruction Jérôme avait affirmé : "quand je suis rentré le soir du 30 novembre Magali donnait le biberon à Lubin. Elle l'avait dans ses bras, je ne me suis pas penché pour observer Lubin"] Le jeudi matin le 1er décembre, je suis parti très tôt et suis revenu le soir tard vers minuit. Le bébé a refusé le biberon de la nuit . J’ai insisté mais comme il ne voulait pas, je l’ai recouché. Jérôme Duchemin se met alors à pleurer. Il évoque ces instants privilégiés, la tendresse, l’amour et sa relation fusionnelle avec son bébé. MAÎTRE SENYK : - Vous lui donniez comment le biberon ? JERÔME DUCHEMIN : - Je le couchais dans son petit transat. (Il reprend le cours de son récit) : - Je suis réveillé par Magali, vers 3h00, elle me dit que le bébé ne va pas bien. Je le mets sur la table à langer, demande à Magali de lui enlever ses couches, je lui tâte le ventre, l'écoute, l’entend geindre (mais je ne connaissais pas le terme à l’époque). Je suis effrayé par l’aspect liquide des selles, mais ne voyais pas la nécessité d'appeler SOS médecins, ce n'est pas la peine. Magali insiste et j'appelle. Je vais me recoucher seulement lorsque je vois les gyrophares en bas de l'immeuble, il est inutile d’être deux. Je me réveille vers 6h30-7h00. Magali est assoupie dans le salon auprès du bébé. Elle dit que par prudence elle va appeler le pédiatre. Je lui fais confiance. J'embrasse Lubin, sans réactions de sa part. Le PRESIDENT : - Qu’est ce qui vous a amené à choisir ce prénom, vous l’avez choisi ensemble ? JERÔME DUCHEMIN : - Nous avons acheté un livre des prénoms puis on a fait une liste et dans les prénoms que nous avions en commun, il y avait celui ci. Nous voulions un prénom qui plaise aux deux familles. L’AVOCAT GENERAL à Magali Guillemot : - Pourquoi avoir attendu 9h20 pour rappeler le cabinet du Dr Breton, alors qu’il ouvre à 9h00 ? MAGALI GUILLEMOT : Magali répond vaguement qu'elle s'est occupée entre 7h00 et 9h00, qu’elle ne s’est pas rendue compte de l’heure. Elle voulait montrer son enfant au pédiatre, il avait mal pris le biberon, le médecin de SOS-médecins le lui avait conseillé mais lui avait dit que ce n'était pas grave. [NdlR : Jérôme quant à lui était parti après avoir embrasé son fils à sept heures et l'état de bébé n'avait provoqué aucune inquitéude chez lui] Le PRESIDENT revient sur le biberon du 30/11 au soir. Le PRESIDENT : - Que s’est-il passé quand vous êtes rentré le soir du 30 novembre ? JERÔME DUCHEMIN : - Je rentre, je vois le bébé dans les bras de sa mère. Je n’ai pas pris Lubin, à ce moment-là. Puis sa mère est alors allée le coucher, je l’ai laissée faire. Plus tard, je suis allé embrasser le bébé. Je n’ai pas posé de question à Magali. Intervention de Maître Lombard. MAÎTRE LOMBARD : - Je vous ferai remarquer quelques instants plus tôt Jérôme Duchemin vient d’affirmer que lorsqu’il était rentré à la maison, Lubin était couché, et que Magali lui avait dit avoir déjà donné le biberon. JERÔME DUCHEMIN : - Mais je n’ai pas dit cela. Le PRESIDENT : - Ce que dit Maître Lombard est exact. Vous vous contredisez sur ce qui s’est passé le 30 novembre au soir. MAÎTRE LOMBARD à Jérôme Duchemin : - Lorsque vous avez ausculté Lubin dans la nuit du 1er au 2 décembre, avez-vous vu des marques ? JERÔME DUCHEMIN : - Non, je n’ai rien constaté comme marques. Me SENYK fait lecture du rapport anatomo-pathologique et dit que sur la tête à droite il n’est pas constaté de lésion à l'épiderme. Magali Guillemot demande à intervenir. Magali GUILLEMOT : - A propos du heurt contre la porte, dans la matinée du 30 novembre. Jérôme était là lorsque ça s'est passé, il était dans l'appartement, il regardait la télé. L’AVOCAT GENERAL : cite un témoignage de rencontre de Jérôme avec Mme Lemoine le 1er Décembre, au cours de laquelle Jérôme Duchemin expliquait que le bébé s'appelait Lubin ; il était rayonnant et il devait donner un concert. L'AVOCAT GENERAL à Jérôme Duchemin : - N'aviez-vous pas l'impression de laisser votre épouse seule ? En état d'abandon et de détresse ? JEROME - Oui. Détresse je ne sais pas, mais seule oui. D’ailleurs on n’avait pas de contact. On communiquait souvent par post-it. Fin de la déposition. |